La France a-t-elle toujours le potentiel pour devenir un acteur majeur dans le monde des crypto-monnaies et de la blockchain ?
C’est en tout cas ce que laisse entendre la loi Pacte. Alors que les marchés des cryptomonnaies, le Bitcoin en tête, ont dégringolé l’année dernière, les députés ont adopté une série de mesures, via la loi Pacte, qui doivent permettre de faire de la France un territoire privilégié pour les levées de fonds sur la blockchain, c’est-à-dire les ICO.
La loi Pacte, qui résulte de nombreux mois de travail à l’Assemblée Nationale, permet à la France d’offrir un cadre juridique souple et incitatif pour les ICOs (Initial Coin Offering) avec la création d’un visa de l’AMF, l’Autorité des Marchés Financiers.
N’est-ce pas un peu tard ?
Cette loi semble donc aller dans le bon sens, sauf qu’elle arrive un peu tard… En effet, le nombre d’ICO en préparation est en chute libre.
En 2018, l’AMF décomptait plus de 50 projets à venir, mais ils ne sont désormais qu’une poignée, ce qui s’explique avant tout par le plongeon de l’ensemble du marché des crypto-monnaies, ainsi qu’à de multiples affaires d’arnaques liées à des ICOs.
De plus, les projets restant semblent plus sérieux, un tri naturel s’étant opéré, et la nécessité d’un cadre spécifique aux ICOs semble moins frappate aujourd’hui.
C’est un avis partagé par Franck Guiader, du cabinet d’avocats Gide, d’après un article du journal Les Echos, selon qui « il y a moins d’opérations qu’avant parce que le secteur s’est professionnalisé, les projets sont plus aboutis ».
Le statut PSAN, l’autre bon point de la loi Pacte
La loi Pacte a également donné lieu à la création des agréments PSAN (« prestataires de services d’actifs numériques »), qui sera délivré par l’AMF.
Il est optionnel dans la plupart des cas, sauf quand il s’agit d’activité de conversion de crypto-monnaies en monnaies FIAT.
« Ce statut de PSAN suscite, lui, beaucoup d’engouement », explique au journal Les Echos Benoît de Juvigny, secrétaire général de l’AMF.
Une vingtaine de dossiers seraient en attente auprès de l’AMF, celui-ci étant largement considéré comme un gage de sécurité et de crédibilité pour les entreprises liées aux crypto-monnaies en quête de reconnaissance et désireuses de « montrer patte blanche ».
Les entreprises ayant déposé des demandes seraient aussi diverses que des plates-formes d’échange de crypto-monnaies, des société fabriquant des « cold wallet » cryptographiques, tels que le français Ledger, ou des conseillers en investissement.
Selon le journal Les Echos, la start-up Coinhouse, qui permet d’acheter et vendre des crypto-actifs, ou encore LGO Exchange, une plateforme d’échange de crypto-monnaies basée entre Bordeaux et New York, et Paymium, une autre plateforme d’échange de crypto-monnaies auraient déposé une demande d’agrément PSAN.
Le Bitcoin peut désormais trouver son chemin vers les contrats d’assurance-vie
Enfin, on notera que grâce à la loi Pacte les assureurs pourront désormais proposer des contrats d’assurance-vie exposés aux crypto-monnaies. Il s’agit d’une information important, les contrats d’assurance-vie étant un des placements les plus populaire en France.
En plus de permettre une potentielle arrivée d’argent frais sur le marché des crypto-monnaies via l’assurance-vie, le fait que ces actifs aient légalement leur place au sein de produit d’investissement aussi populaire augmente également la légitimité et la crédibilité du marché des crypto-monnaies dans son ensemble.
« Ce n’était pas l’objectif premier de Pacte, mais les assureurs pourront effectivement offrir des produits basés sur des crypto-actifs. Ils le pourront via des fonds spécialisés », a en effet confirmé la semaine dernière le député LREM et rapporteur du budget, Joel Giraud.
Plus précisément, on notera que ce sont les Fonds Professionnels Spécialisés (FPS) éligibles à l’assurance-vie, qui peuvent désormais investir dans tous types d’actifs non-cotés, avec davantage de souplesse, puisque tout bien faisant l’objet d’une « inscription dans un dispositif d’enregistrement électronique partagé » peut composer l’actif d’un FPS, ce qui inclue les crypto-monnaies.
Emilien Bernard-Alzias, avocat chez Simmons & Simmons LLP, souligne aux Echos qu’ « avec ces deux dispositions, il est écrit noir sur blanc que les FPS peuvent investir dans des crypto-actifs comme le bitcoin », ajoutant qu’il y a « évidemment une dimension exploratoire avec ce nouveau dispositif. Les choses sont là, à charge pour les assureurs de s’en emparer ou pas ».